Marché public de faible montant
En tant que gestionnaire d’ASBL, vous pouvez être amené à conclure des marchés publics. Pour rappel, les marchés publics sont des contrats portant sur des travaux, des fournitures ou des services, passés entre un pouvoir adjudicateur – ici, l’ASBL – et un opérateur économique.
Cette note se concentre sur la procédure des marchés publics de faible montant. En effet lorsque la dépense estimée ne dépasse pas 30.000 € (HTVA), un régime assouplit s’applique. D’autres procédures existent, pour un aperçu, consultez le site de BOSA : BOSA – Types de procédures.
L'ASBL en tant que pouvoir adjudicateur
Une ASBL est considérée comme pouvoir adjudicateur, au sens de l’article 2 la loi relative aux marchés publics, seulement si elle dépend de l'Etat, des Régions, des Communautés, des autorités locales ou d'autres organismes, de l'une des manières suivantes :
- soit son activité est financée majoritairement par ceux-ci ;
- soit sa gestion est soumise à leur contrôle ;
- soit plus de la moitié des membres de l'organe d'administration, de direction ou de surveillance sont désignés par ceux-ci.
La passation du marché public consiste alors pour l’ASBL, à conclure :
- Un contrat à titre onéreux : ne seront pas concernés les dons ni les subsides.
- Un contrat avec un opérateur économique : une personne morale privée ou publique, avec ou sans but de lucre, qui offre la réalisation de travaux, des fournitures ou des services sur le marché.
Principes généraux à respecter
Indépendamment du montant du marché, les principes fondamentaux suivants doivent être garantis :
- Égalité,
- Non-discrimination,
- Transparence,
- Proportionnalité.
Ces règles assurent une procédure équitable en garantissant un accès égal aux informations pour tous les soumissionnaires. Les critères d’attribution doivent être pertinents par rapport à l’objet du marché, et aucun opérateur ne peut être avantagé ou désavantagé sans raison valable.
D’autres obligations sont également à respecter :
- Préserver la concurrence et éviter le « saucissonnage » des marchés (pratique qui consiste à découper une opération d’achat en plusieurs dans le but d'éviter certaines formalités de mise en concurrence et de publicité) ;
- Prévenir les conflits d’intérêts par des mesures adaptées ;
- Respecter les réglementations environnementales, sociales et du travail ;
- Obtenir un prix clair dès le départ : il doit être fixé ou déterminable en amont et ne peut être modifié, sauf si une clause spécifique a été prévue dans le cahier des charges ;
- Garantir la confidentialité : tant qu’aucune décision d’attribution n’a été prise, les documents liés à la procédure restent inaccessibles aux soumissionnaires.
Les 2 principes généraux ci-dessous ne sont en revanche pas d’application dans le cadre du régime assoupli des marchés publics de faible montant :
- L’obligation de paiement après service fait et accepté : ce principe interdit les avances, le règlement ne pouvant intervenir qu’à l’issue du marché.
- L’usage exclusif des moyens de communication électroniques : en temps normal, toutes les interactions entre l’adjudicateur et les opérateurs économiques doivent se faire par voie électronique à chaque étape de la procédure.
En pratique
Dans la passation d’un marché public de faible montant, on peut distinguer plusieurs étapes :
-
Avant toute chose, le pouvoir adjudicateur doit définir précisément ses besoins. Il est essentiel de tenir compte des éventuelles reconductions, de la répartition en lots et des répétitions. Pour les secteurs classiques (autres que les secteurs de l'eau, l'énergie, les transports et les services postaux), l'arrêté royal relatif à la passation des marchés publics du 18 avril 2017, précise :
- Pour les marchés publics de travaux, le calcul de la valeur estimée prend en compte le coût des travaux ainsi que la valeur totale estimée des fournitures et des services mis à la disposition de l'adjudicataire par le pouvoir adjudicateur s'ils sont nécessaires à l'exécution des travaux (Article 7 §7).
- Lorsqu'il s'agit de marchés publics de fournitures ou de services présentant un caractère de régularité ou destinés à être renouvelés au cours d'une période donnée, est prise comme base pour le calcul de la valeur estimée du marché :
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Soit la valeur réelle globale des marchés successifs analogues passés au cours des 12 mois précédents ou de l'exercice précédent, corrigée, si possible, pour tenir compte des modifications en quantité ou en valeur qui surviendraient au cours des 12 mois suivant le contrat initial;
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Soit la valeur globale estimée des marchés successifs passés au cours des 12 mois suivant la première prestation ou au cours de l'exercice si celui-ci est supérieur à 12 mois.
- Pour les marchés publics de fournitures ayant pour objet le crédit-bail, la location ou la location-vente de produits, la valeur à prendre comme base pour le calcul de la valeur estimée du marché est la suivante :
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En cas de marchés publics ayant une durée déterminée, dans la mesure où celle-ci est égale ou inférieure à 12 mois, la valeur totale estimée pour la durée du marché ou, dans la mesure où la durée du marché est supérieure à 12 mois, la valeur totale incluant le montant estimé de la valeur résiduelle;
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En cas de marchés publics ayant une durée indéterminée ou dans le cas où leur durée ne peut être définie, la valeur mensuelle doit être multipliée par 48.
- Pour les marchés publics de services, l'estimation inclut la rémunération totale du prestataire de services. Aux fins de calcul de cette valeur, sont pris en compte :
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Pour les services d'assurance : la prime payable et les autres modes de rémunération;
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Pour les services bancaires et autres services financiers : les honoraires, les commissions payables, les intérêts et les autres modes de rémunération;
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Pour les marchés impliquant la conception : les honoraires, les commissions à payer et les autres modes de rémunération.
- En ce qui concerne les marchés publics de services n'indiquant pas un prix total, la valeur estimée des marchés est calculée sur la base suivante :
1° En cas de marchés ayant une durée déterminée, si celle-ci est égale ou inférieure à 48 mois : la valeur totale pour toute leur durée;
2° En cas de marchés ayant une durée indéterminée ou supérieure à 48 mois : la valeur mensuelle multipliée par 48.
Plus cette analyse est précise et complète, plus les offres reçues correspondront aux attentes. Cette étape est également déterminante pour le choix de la procédure. En effet, c’est seulement si le montant estimé (HTVA) est inférieur à 30.000 euros, qu’il convient d’appliquer la procédure simplifiée des marchés publics de faible montant.
- L’étape suivante consiste à conserver une preuve de la consultation de plusieurs opérateurs économiques (il est recommandé d’en consulter au moins 3). Concrètement, il faut être en mesure de fournir, par exemple, une capture d’écran de recherches sur plusieurs sites internet, des extraits de catalogues ou encore plusieurs devis, réunis dans un dossier administratif.
Si la mise en concurrence s’avère impossible, il est impératif d’en justifier les raisons par écrit.
Si la rédaction d’un cahier des charges n’est pas obligatoire, prévoir un descriptif de marché peut s’avérer pertinent. Il est conseillé de préciser a minima les éléments suivants :
- Critère d’attribution (offre économiquement la plus avantageuse, délai d'exécution/delivraison),
- Modalités pour déposer l'offre (quels documents utiliser, via quel canal remettre l'offre, dans quel délai)
- La non-opposabilité des conditions générales et particulières de vente des soumissionnaires,
Exemples
Deux exemples sont fournis ci-dessous permettant d’illustrer deux types de situation :
Soit, l’objet du marché est tel qu’il donnera lieu à une comparaison facile, et il n’est pas nécessaire de respecter un formalisme particulier dans la comparaison des offres et la sélection finale.
Soit, il semble opportun de discuter de certains points avec les soumissionnaires potentiels. Dans ce cas, notifier la décision finale aux soumissionnaires ayant échangé avec vous est conseillé.
EXEMPLE 1 : Une ASBL souhaite acquérir du matériel de bureau.
- Elle va d’abord vérifier au sein de son organisation s’il existe un contrat via lequel les fournitures pourraient être achetées. Si ce n’est pas le cas, le matériel doit être acheté via un nouveau marché public.
- L’ASBL va devoir définir son besoin et déterminer quelles sont les fournitures achetées habituellement. Pour comparer les prix de fournitures de bureau sans perdre de temps, il est conseillé de constituer un panier composé de ce dont elle a besoin chez 3 fournisseurs. Garder, dans le dossier administratif, la preuve de cette comparaison. Les fournitures de bureau sont souvent des dépenses récurrentes. Il convient d’estimer sur 12 mois le cout engendré.
- L’ASBL sélectionnera en principe l’offre la plus intéressante, soit le panier le moins cher. D’autres critères peuvent cependant entrer en ligne de compte tel que les délais de livraison, l’origine des produits, etc.
Si l’estimation est inférieure à 30.000 € HTVA sur une durée de 12 mois, il vous est alors possible de faire un marché public de faible montant. La facture du fournisseur sélectionné après comparaison des prix des 3 paniers, vaudra preuve de la conclusion du marché.
EXEMPLE 2 : Une ASBL veut organiser une formation sur mesure :
1. Dans cette hypothèse, la rédaction d’un descriptif de marché (ou cahier des charges simplifié) est conseillée. Les informations suivantes peuvent être précisées :
- L’objet : l’organisation d’une formation (thématique)
- Les objectifs poursuivis par la formation
- Le contenu de la formation (durée, déroulé, nombre de participants)
- Les modalités d’organisation : lieu, horaire, matériel disponible
- Inviter le soumissionnaire à préciser, par exemple : les qualités et expertises des formateurs, les supports de formations utilisés, le prix forfaitaire, les frais de déplacement éventuels.
- Donner une date limite pour remettre l’offre via le canal choisi : par mail, par envois postal.
2. Après une analyse objective des différentes offres des opérateurs de formation, il conviendra de sélectionner la formation correspondant au mieux aux besoins émis par l’ASBL et de notifier sa décision à l’ASBL sélectionnée.
3. L’ASBL fait part de sa décision finale aux opérateurs de formation n’ayant pas été retenus.
Obligation de rapportage
La législation impose désormais une obligation de reporting pour les marchés de faible montant, c’est-à-dire ceux conclus entre 3.000 et 30.000 euros (HTVA). Ce rapport doit être transmis chaque année, au plus tard le 15 février. Pour la première fois, cette obligation s’appliquera le 15 février 2025 pour les marchés passés en 2024. Les données à reporter concernent :
- La valeur totale des marchés de faible montant conclus l’année précédente.
- Une ventilation de cette valeur par entreprise bénéficiaire, en distinguant les marchés selon leur nature :
- Travaux;
- Fournitures;
- Services.
Bien que la loi n’impose pas l’encodage systématique des marchés dans e-Procurement, cette plateforme propose un système permettant de faciliter ce reporting annuel. Pour plus d'information, nous vous conseillons de prendre connaissance du Guide pratique réalisé par BOSA.